Nicola Lo Calzo

1979, né à Turin, Italie, vit et travaille en France
Nominé·e - Prix Elysée 2019

Après des études d’architecture du paysage, Nicola Lo Calzo s’oriente vers la photographie. Sa pratique et sa recherche photographiques interrogent les notions de colonialité et d’identité. Témoignant d’une empathie profonde, ses photographies donnent notamment à voir les façons dont les groupes minoritaires interagissent avec leur environnement, développent des stratégies de survie et de résistance.
Depuis près de sept ans, Lo Calzo s’est engagé dans une recherche photographique au long cours autour des mémoires de la traite négrière et de l’esclavage. Ce projet ambitieux, intitulé Cham, a connu et connaîtra encore de nombreuses étapes en Afrique, dans les Caraïbes et en Amérique. Ses photographies ont fait l’objet de nombreuses expositions dans des musées, centres d’art ou festivals, dont le Macaal à Marrakech, Afriques Capitales à Lille, le Musée des Confluences de Lyon, le Musée national Alinari de la photographie à Florence et le Tropenmuseum à Amsterdam. Il est présent dans de nombreuses collections privées et publiques, dont la Lightwork collection à Syracuse (Etat de New York), les Archives Alinari à Florence, la Pinacoteca Civica à Monza, la Bibliothèque nationale de France à Paris ou encore le Tropenmuseum à Amsterdam.

Nicola Lo Calzo vit et travaille entre Paris, l’Afrique de l’Ouest et les Caraïbes. Il est représenté par l’Agence à Paris.

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Projet

Binidittu

Nicola Lo Calzo, pour qui la Méditerranée n’a jamais été une frontière, veut nous faire redécouvrir un migrant, Biniditttu, surnom de l’ermite saint Benoît le More, fils d’esclaves africains qui naquit en Sicile au XVIème siècle. Lorsqu’il mourut, le frère afro-sicilien était devenu une icône. Canonisé en 1807, il fut le premier saint noir de l’Eglise catholique et choisi comme saint patron de Palerme. Binidittu est une réflexion sur l’accueil des migrants sur les côtes de Mare nostrum, une allégorie pour notre temps.

« Depuis plusieurs années, je travaille sur un projet photographique intitulé Cham, à travers lequel je documente les multiples descendances et manifestations des mémoires de l’esclavage colonial. Cette quête m’a amené des rivages de l’Afrique de l’Ouest aux périphéries de Port-au-Prince, en passant par les Mornes de la Guadeloupe, les quartiers oubliés de la Nouvelle-Orléans, les rives du fleuve Maroni et les faubourgs de Santiago de Cuba.

Pour la prochaine étape de Cham, je poursuis mon travail aux abords de la mer Méditerranée, notamment en Sicile, avec le projet Binidittu.

La Méditerranée n’a jamais été une frontière. Depuis toujours, le Mare nostrum appartient à qui le parcourt, l’habite et le contrôle. Les migrants d’aujourd’hui sillonnent ses eaux à la recherche d’une nouvelle vie.

Comme la plupart des riverains, ils ignorent probablement que ces eaux prodigieuses ou funestes furent la patrie d’un autre migrant, symbole de liberté et d’émancipation. Il s’appelait Benoît, ou Binidittu, comme le rebaptisèrent familièrement les Siciliens. Fils d’esclaves africains, né à San Fratello dans la province de Messine, il vécut et mourut en Sicile comme frère ermite (1526-1589). Canonisé en 1807 en tant que saint Benoît le More, il fut le premier saint noir de l’Eglise catholique.

Au « migrant », au « réfugié », à « l’Africain », les Siciliens de l’époque opposèrent l’humanité de Benoît, et n’hésitèrent pas à le désigner saint patron de Palerme.

Ce projet photographique a pour ambition de contribuer à la redécouverte de Binidittu, de retracer la vie improbable de saint Benoît le More, d’explorer les lieux historiques de son hagiographie, les motivations de ses fidèles, le culte des reliques, les pratiques religieuses et séculières qui lui sont vouées en Sicile et dans le monde méditerranéen.

Binidittu apparaît comme une allégorie de notre époque : la rencontre entre le Mare nostrum et le monde, l’oubli et la mémoire, le racisme banalisé et l’humanité partagée, les aspirations du peuple sicilien et les espoirs de liberté et dignité des migrants africains à la dérive vers les côtes européennes. »