Camille Gharbi

1984, France
Nominé·e - Prix Elysée 2025

Camille Gharbi (FR, 1984) est une photographe et artiste visuelle française. Sa pratique artistique porte sur des problématiques sociales contemporaines suivies au long cours, dont les violences de genre et le vivre ensemble, questionnant l’ambivalence de la nature humaine. Entre photographie documentaire et conceptuelle, sa démarche interroge l’état du monde en jouant sur la distance et l’esthétique afin de convoquer l’empathie et le sensible. Considérant l’art comme vecteur de transformation, ses œuvres emmènent vers une politisation du regard par l’intime et le subjectif.

Son travail a été présenté notamment au Fotorio de Rio de Janeiro (2023), à la Biennale Photoclimat de Paris (2023), au festival Circulation(s) à Paris (2019), et à la Nuit de l’Année des Rencontres d’Arles (2019). Camille Gharbi est lauréate du Prix Fidal Youth Photography (2018) et du BBA Gallery Photography Award (2021) pour sa série Preuves d’amour et a reçu le Visa d’or de l’information numérique de Visa pour l’Image (2020) avec Le Monde et la Grande Commande Photo 2022 portée par la Bibliothèque Nationale de France.

Projet

Intimes convictions

Intimes convictions est une réflexion sur la construction des rapports de pouvoir à l’œuvre dans nos sociétés, au prisme des violences sexuelles. Il interroge le sens que prennent les violences lorsqu’elles se manifestent dans nos interactions les plus privées. À travers le difficile sujet de la soumission chimique, qui consiste à administrer à l’insu d’une personne une substance psychotrope à des fins criminelles, ce travail photographique, pensé comme une enquête mêlant photographie documentaire, conceptuelle, archives, et vidéos, cherche à mettre en lumière les structures invisibles qui déterminent nos sociétés.

Partout, les violences sexuelles s’illustrent par le peu de condamnations auxquelles elles donnent lieu, et par la surprise récurrente qu’elles provoquent. Ces violences ont la particularité d’être principalement masculines et difficilement démontrables. Cela s’explique de différentes manières. Il y a la difficulté à prouver l’événement, qui provient de la nature même des faits et de l’absence fréquente de pièces à convictions. Il s’agit de démontrer ce qui ne se voit plus, ce qui n’a pas été vu.

Dans certains cas, il s’agit de démontrer ce dont on ne se souvient même plus, la personne concernée ayant été privée de sa conscience. Il y a aussi la tolérance dont la plupart des sociétés font preuve à l’encontre de ce type d’affaires, qui s’explique par la culture et tous les récits fictionnels (cinématographiques, littéraires, publicitaires, etc.) qui structurent nos imaginaires. Les faits réels nous échappent; restent les faits vraisemblables, et les images que l’on se fait.

Prenant pour point de départ un fait divers incarnant un véritable fait de société, ce travail cherche à mettre en lumière la terrible banalité de la culture du viol. Il s’agit d’une réflexion visuelle sur le regard toujours subjectif que l’on porte sur le monde. Celui-là même qui forge nos intimes convictions. Et sur les possibilités de son évolution.